À n'en pas douter, certains députés tiennent à leurs principes, et ne se laissent pas arrêter par de triviales considérations pratiques lorsqu'il s'agit de les faire appliquer. Ainsi en est-il de Jérôme Chartier, si l'on en juge par la discussion accompagnant son amendement n°275 rectifié à la Loi de finances pour 2006, qui vise, au nom de l'égalité devant l'impôt, à taxer l'habitation de ceux qui ont comme habitude de l'emporter avec eux. S'agissant de fiscalité locale, l'idée de lever, sous forme de vignette, une taxe d'habitation sur les caravanes paraît un peu saugrenue, et l'on se demandera sans doute longtemps quel peut bien être ce "lieu d'implantation" où est dû l'impôt, s'agissant de gens dont la caractéristique essentielle est, justement, de ne pas en avoir d'attitré.

Pourtant, ces gens, justement dénommés du voyage, ne trouvent pas l'initiative particulièrement comique : à 75 euros le mètre carré, pour des véhicules dont la surface peut dépasser les 15 m² alors que, de l'avis même de la représentation nationale, nombre d'entre eux sont insolvables, on comprend leur réaction. On la comprend d'autant mieux si l'on effectue la comparaison avec son habitation personnelle : ainsi, mon humble logis étant taxé à raison de 6,7 euros du mètre carré, on en conclura que, pour ce qui concerne les gens du voyage, rétablir l'équité républicaine implique de leur imposer un prélèvement douze fois supérieur ; serait-ce, au fond, le prix de l'indépendance, de la dissidence, ou de la marginalité ?