Nombre d'entre eux ont comme excuse le fait d'être en vacances. Les autres, entre la campagne israëlo-hezbollienne, la tempête du Tour, le coup de tonnerre lancé par le Conseil constitutionnel, et l'ordinaire torpeur caniculaire, présentent un éventail de justifications qui expliquent que, aux funérailles de l'OMC, on ne croisera guère que Tanstaafl.
Il est vrai que, durant sa brève existence, cette victime collatérale d'une météorologie politique particulièrement défavorable, avec le coup de tabac attendu lors des élections américaines de novembre ou le temps mitigé qui pèsera sur la France de 2007, sera restée incomprise et détestée, tout comme son actuel directeur général, Pascal Lamy le renégat, lui qui professe cette inconcevable prétention à accomplir honnêtement sa tâche et à défendre le bien commun au lieu de, en vrai français et en bon européen, favoriser son clan.

Car en se séparant sans même l'habituelle déclaration de principe, histoire de sauver la face, et sans même fixer la date de leurs retrouvailles, en se renvoyant la balle du coton américain aux céréales européennes, en s'accusant mutuellement d'avoir fait capoter l'affaire, les grands pays, plutôt que de contraindre leurs quelques milliers de gros agriculteurs à enfin vivre de leurs terres au lieu de profiter du travail des autres, viennent d'enterrer le multilatéralisme. Tel est bien le sens du récent communiqué de l'OMC, d'une rare amertume, et qui expose sans détour les conséquences de ce coup fatal : le cycle de négociations dit de Doha, entrepris depuis cinq ans, est désormais suspendu dans toutes ses composantes, même celles qui n'ont rien à voir avec cette si pitoyable protection de ces grosses entreprises agricoles dont les efforts d'efficacité et de productivité semblent surtout porter sur la culture du clientélisme. On sent, dans cette décision, une sorte de coup de force désespéré, une façon de brûler ses vaisseaux en incitant les acteurs non-agricoles à monter au créneau, à utiliser les mêmes armes pour faire pression sur leurs gouvernants et tenter d'écarter cette option qui seule se présente désormais : le bilatéralisme au lieu du multilatéralisme, le jeu des sphères d'influence à la place de l'égalité de traitement, le cancer du clientélisme plutôt que le libre-échange.
Le cycle de Doha, avec sa noble et bien peu crédible ambition de lutte contre la pauvreté étant mort, il revenait au porte-parole officiel des pauvres, Jacques Diouf, le Directeur général de la FAO, d'en écrire l'épitaphe. Et là ou il parlait de droits son interlocuteur, Jacques Chirac, l'ami des paysans riches, l'homme de la taxe sur les billets d'avions, distribuait les petits cadeaux, et donnait des poissons. La jeunesse de cette Afrique qui ne pourra donc pas vivre de son travail, qui n'a pas encore entamé sa transition démographique, et encore moins sa mutation politique, comprendra donc dans quelle chimère placer ses espoirs : l'émigration.